Intégrer le mécénat dans la stratégie de l’entreprise : la cerise sur le gâteau
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Le mécénat d’entreprise est un dispositif fiscal qui permet aux entreprises de faire des dons aux organismes d’intérêt général. En France, le mécénat est aussi une opportunité stratégique pour les entreprises. Donner pour gagner… Comment est-ce possible ? On vous l’explique en synthèse ici, en tant qu’invité du blog MMIO, et en long et en large dans notre Guide du mécénat d’entreprise sur SOESS. Mais avant de commencer, disons le tout de suite, intégrer le mécénat dans la stratégie de l’entreprise n’est que la cerise sur le gâteau. 

En effet, encore faut-il déjà avoir une stratégie d’entreprise qui permet de générer des bénéfices... Donner pour gagner plus donc. C’est possible en associant tous les bénéfices qu’une entreprise peut retirer du mécénat en l’intégrant à sa stratégie globale.

Pour ce faire, il faut mettre dans l’équation tous les ingrédients qui font la vie de l’entreprise : de la fiscalité, de la gestion des ressources humaines, une pointe de logistique et une bonne dose d’anthropologie (autrement dit les enjeux réputationnels et relationnels). 

La fiscalité généreuse du mécénat d'entreprise en France

Une “fiscalité généreuse”... C’est de la provocation ?

Un peu, mais en matière de mécénat, ce n’est pas nous qui le disons, c’est la Cour des comptes dans son rapport Le soutien public au mécénat d’entreprises.

Le régime fiscal du mécénat d’entreprise en France fait partie des plus généreux au monde. Voyons pourquoi. 

1.1. La réduction d’impôt sur les sociétés au titre du mécénat

Quand je donne 100 et que ça ne me coûte que 40, je gagne un peu non ? L’article 238 bis du Code Général des Impôts permet aux entreprises de bénéficier d’une réduction d’impôt de 60% du montant de leurs dons, jusqu’à 0,5% de leur chiffre d’affaires. 

Par exemple, une entreprise avec un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros peut faire un don de 50 000 euros et obtenir une réduction d’impôt de 30 000 euros. Il ne lui en coûte alors que 20 000. 

Pour rendre le mécénat accessible aux petites et moyennes entreprises, une franchise de 20 000 euros a été instaurée. Ainsi, indépendamment de son chiffre d’affaires, une PME peut donner jusqu’à 20 000 euros et bénéficier d’une réduction d’impôt de 60% du montant du don.

Pour les dons excédant 2 millions d’euros (si vous êtes dans ce cas là, appelez-moi) la réduction d’impôt est de 40% au lieu de 60%. Cependant, pour les dons à des organismes d’aide aux personnes en difficulté (loi Coluche), le taux de 60% est maintenu. 

Les entreprises peuvent étaler la réduction d’impôt sur cinq exercices comptables. Cela permet de faire un don important en une seule fois tout en profitant de l’avantage fiscal sur plusieurs années, ou de limiter les risques si on est pas certain de faire son CA.

1.2. Les types de dons éligibles au mécénat d’entreprise

Quand on donne quelque chose qui coûte, on gagne un peu non ?

Les entreprises peuvent effectuer des dons en numéraire, évidemment, mais aussi via l’abandon de revenus (plutôt que de vous payer, votre client verse la somme à un organisme de votre choix en votre nom). Les dons de biens mobiliers et immobiliers, de prestations et la mise à disposition de personnel sont aussi éligibles, et c’est là que les choses deviennent intéressantes.

On entend par mécénat en nature le don de biens immobiliers, mobiliers, ou de prestations de services. La valorisation de ces dons est un enjeu pour le calcul de la réduction d’impôt. Les biens immobilisés sont en effet valorisés à leur valeur de cession, tandis que les biens mobiliers et les prestations de services sont valorisés à leur coût de revient.

N’oubliez donc pas d’ajouter les frais de transport et le coût de stockage des invendus (si si, ceux qui traînent depuis des années au fond de l’entrepôt) lorsque vous en donnez la valorisation à l’organisme qui bénéficie de votre don, pour qu’il établisse son “reçu fiscal mécénat”. 

Ce type de mécénat implique la mise à disposition de salariés sur leur temps de travail rémunéré et à titre gratuit. La valorisation de cette mise à disposition est plafonnée à 10 284 euros par mois et par salarié, ce qui permet aux entreprises de bénéficier d’une réduction d’impôt significative tout en engageant leurs employés dans des projets d’intérêt général.

Plutôt que de rager quand Maryse et Jean-Pierre (les fidèles du blog MMIO comprendront) s’ennuient au bureau le vendredi, envoyez-les travailler pour une cause qui leur est chère dans une asso, et gagnez 60% en réduction d'impôt sur la masse salariale mobilisée.  

 

Intégrer les contreparties au mécénat dans la stratégie de l'entreprise 

Le mécénat d'entreprise doit soutenir des activités d'intérêt général, et non les intérêts de l'entreprise, c’est le principe. Néanmoins, le fisc autorise les contreparties au don, à hauteur de 25% du montant de ce dernier, assumant une logique de don - contre-don (de l’anthropologie !).

Quand je donne 100, que ça ne me coûte que 40, et si on me rend 25, je commence à être pas mal non ?

Et encore faut-il distinguer les contreparties symboliques des contreparties à valeur vénale. Les contreparties symboliques (titres honorifiques pour le donateur, mentions discrètes sur des programmes ou des sites web) sont acceptées par le fisc, sans valorisation.

Attention, il ne doit pas s’agir de publicité déguisée, au risque de voir l’opération requalifiée en parrainage (sponsoring en bon franglais). 

La valeur des contreparties sous forme de biens et services doit être clairement déterminée et ne pas dépasser 25% du montant du don. Les bénéficiaires de dons doivent évaluer les contreparties qu’ils accordent à l’entreprise donatrice en alignant leur valorisation sur les prix pratiqués ou en documentant rigoureusement la valeur attribuée. 

De quoi s’agit-il ? 
  • Votre entreprise donne au titre du mécénat à un théâtre ou à l’opéra, voire à un club de sport ? 
    Vous obtenez des billets gratuits en retour.
  • Vous donnez vos stocks à une ressourcerie ? Elle vous donne de la déco ou du mobilier en échange.
  • Vous donnez à un musée ? Il vous loue gratuitement une salle en contrepartie. Le champ des possibles est vaste. 

     

Pourquoi intégrer le mécénat dans la stratégie de l’entreprise ?

J’ai donc donné 100, qui ne m’ont coûté que 40, et on m’a rendu 25. Ça me coûte encore 15 me direz-vous. C’est le principe, et la beauté du geste philanthropique.. mais pas uniquement. 


Intégrer le mécénat dans la stratégie d’entreprise permet d’agir sur des leviers plus immatériels, mais aux effets bien réels. Le mécénat est pour une entreprise l’opportunité de manifester ses valeurs. Cela a un retentissement sur sa réputation et sa culture d’entreprise

3.1.Renforcer la réputation de l’entreprise et sa RSE grâce au mécénat

En soutenant des causes d’intérêt général, les entreprises améliorent leur image de marque et gagnent en crédibilité auprès de leurs clients et partenaires.

Un engagement fort dans des actions de mécénat peut ainsi aider à se différencier de la concurrence.

Vous l’avez déjà vu sur une étiquette, ou entendu comme argument commercial : “1% de nos bénéfices est reversé à …”. Voilà qui complète de manière originale la liste des 9 idées pour améliorer la notoriété de son entreprise. 

Le mécénat contribue aussi à la stratégie de responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE). Soyons clair, il n’en fait pas office. Ce n’est pas en donnant 5 pour mille de son chiffre d’affaires pour planter des arbres qu’une entreprise de pétrochimie (au hasard) se construit une RSE et s’exonère de ses responsabilités sociétales.

Sinon ça s'appelle du green washing ou du social washing, et c’est le bad buzz réputation assuré. 

Néanmoins, le mécénat est un vecteur supplémentaire de la stratégie de RSE de l’entreprise. Il peut même venir maximiser l’impact de telle ou telle action, lorsqu’il est mis en musique avec la stratégie globale de l’entreprise. 

3.2. Favoriser l’engagement des collaborateurs et attirer les talents


Le mécénat d’entreprise est aussi particulièrement efficace pour fédérer les salariés autour de valeurs communes. En associant les collaborateurs à la gouvernance du mécénat de l’entreprise, ou en les mobilisant à travers le mécénat de compétences, l’entreprise leur offre l’occasion d’exprimer un engagement connexe à celui qu’elle leur demande au travail. 
Les jeunes générations sont particulièrement sensibles aux valeurs et à l’engagement sociétal des entreprises. Une politique de mécénat bien définie peut donc constituer un atout majeur dans la stratégie de recrutement et de fidélisation des talents.
Selon le baromètre 2022 d’Admical, 42% des entreprises voient dans le mécénat de compétences un moyen de fédérer les salariés, et 25% l’utilisent pour attirer des talents. Et 100 000 entreprises en France pratiquent déjà le mécénat.

 

Le mécénat d’entreprise ne se limite pas à des avantages fiscaux (60%) et à des gratuités en contrepartie (25% potentiellement), c’est aussi un levier puissant pour renforcer la réputation et la culture de l’entreprise. En intégrant le mécénat à la stratégie d’entreprise, les dirigeants fédèrent les employés et attirent des talents, notamment de la nouvelle génération.

En contribuant à des causes d’intérêt général, ils consolident leur responsabilité sociétale et leur réputation auprès de leurs clients. En somme, ce n’est pas cher donner (15%) pour bénéficier de tels avantages concurrentiels. Et faire le bien, parce que c’est quand même ça le principe.

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